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  JOURNAL LE HAUT-SAINT-FRANÇOIS / La une

Fin de l’histoire des 125 ans de la papetière d’East Angus

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Jean-Claude Vézina Par Jean-Claude Vézina
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Mercredi le 8 octobre 2014

La sirène de Cascades d'East Angus a hurlé le glas pendant cinq minutes, le 3 octobre dernier. Quelque 180 employés de l'usine de papier ont quitté leur milieu de travail.

L'informatique a terrassé l'impression sur papier surtout dans le domaine des journaux. Une foule de sympathisants les ont accueillis à leur sortie pour tourner une des principales pages de l'histoire de Cascades qui, pendant 125 ans, les a employés.

À 16 h, précise, la sirène a annoncé la fin de la production du papier. Rejoints par leur conjointe, leurs enfants, des parents, des amis, ils ont fait silence. Pour certains, cela signifiait un changement de carrière. Quelques-uns traverseront le pont pour travailler à la cartonnerie. D'autres ont décroché des emplois à l'extérieur. Au moins deux d'entre eux voyageront vers St-Gédéon, d'autres vers Sherbrooke ou Waterville. Il y a ceux qui vont retourner aux études, peu importe leur âge. Puis, un grand nombre se retrouvent devant une impasse. Pas de travail pour eux, même s'ils se sont inscrits au programme de reclassement offert par Groupe concerté des ressources humaines (GCRH) ! Ils sont trop vieux, pas assez formés ou ils ne veulent pas déménager, espérant trouver dans les alentours quelque chose.

Gérald Brochu, technicien en instrumentation et contrôle, a 27 ans d'ancienneté. Il lui suffira de traverser le pont pour aller à la cartonnerie. Il y avait déjà passé 15 ans. Julie, la mère de ses enfants qui a quitté Québec pour s'installer à East Angus, se réjouissait. « Il reste dans la région, il conserve son réseau d'amis. East Angus, on l'a tatoué sur le coeur, je suis venue l'appuyer et tous les autres travailleurs aussi », a-t-elle confié. Pour sa part, Laurianne, leur fille, soupirait d'aise, malgré le fait que tous les parents de ses amies se sont replacés à l'extérieur de la municipalité. 

Pour Guy Gilbert, les lendemains sont moins certains. Il est engagé pour quelque temps pour finir le grand nettoyage de l'usine, mais après, c'est le vide pour cet homme qui y a consacré 31 ans de sa vie. « Aujourd'hui, c'est des funérailles. La machine no 3, c'était ma maîtresse. Les amis que tu vois là, je les ai côtoyés plus que ma femme et mes enfants », a-t-il confié. Poursuivant, il estimait que du point de vue de sa santé financière, il lui aurait fallu travailler 6 ans de plus. « On va essayer de trouver autre chose. Je ne suis pas le premier qui perd son emploi. On va devoir couper dans le gras; on va y aller tranquillement », admettait-il philosophe. Il veut vivre à East Angus. Ses implications comme bénévole, il souhaite les poursuivre auprès des jeunes. « Beaucoup de jeunes voient ce qui se passe et ils tombent en détresse. Si j'évite un suicide, j'aurai fait de quoi sur la terre », ajoutait-il pour justifier son engagement.

Se réconfortant mutuellement, Noëlla Rowland et Lucille Clayton Hall étaient présentes pour la dernière heure de l'entreprise. Leur mari, qui ont commencé à y travailler à 18 ans, ont passé plus de 60 ans à la papetière qui par 4 fois a changé de propriétaire. « C'était des histoires de famille, on a eu de bons moments, de bons partys », se rappelait-elle. Ces deux femmes ont vu leurs parents, leur conjoint, leurs fils, leurs petits-fils oeuvrer à l'usine. « Ils ont laissé leur âme ici, soulignait Mme Hall. Mon mari est mort 3 ans après sa retraite, il y a 18 ans » a-t-elle confié. « Il y en a qui ont le coeur amer, soulignait Mme Rowland, mais d'un autre côté, le moulin nous a fait vivre pendant 125 ans. » Ensemble, elles ont cherché le nom des quatre propriétaires : Canada paper, St-Laurence, Domtar et Cascades. « Mon mari avait 4 petites pensions », s'est-elle souvenue.

Denis Alaire a travaillé pendant 30 ans pour Cascades. À 53 ans, il va suivre une formation en opération et procédé chimique. « Il y a des débouchés ici ». C'est ce qu'il a décidé après être passé au coaching offert par GCRH. Karine Lagueux et sa mère sont venues épauler Ken. « Mon frère travaille ici. C'est difficile ! Ouain ! Tout à fait ! C'est difficile pour la famille autant au niveau salaire que conditions de travail, je veux dire, quand tu as des enfants, c'est pas évident sauf que... », laisse-t-elle en suspend. « J'ai un diplôme en pâte et papier, mais c'est pas le temps ces jours-ci, on va regarder toutes les options possibles », a poursuivi le jeune père de famille qui a consacré 13 ans de sa vie à l'usine.

Il n'y avait pas que de la tristesse chez les gens de la papetière. Certains en avaient gros sur le coeur. Yves Laflotte en était un de ceux qui ont été déçus de la façon dont ça s'est passé. Rappelant que la compagnie est obligée de mandater une firme pour aider les employés à se reclasser, il n'était pas satisfait de la manière dont il a été traité. D'abord, un CV qui aurait pris 30 jours à arriver. Puis il constatait que peu de travailleurs avaient été réorientés vers d'autres entreprises. Enfin, il mentionnait que son fils aurait été découragé de poursuivre ses études. La goutte qui aurait fait déborder le vase est tombée quand, durant le minisalon de l'emploi, les représentantes de Domtar auraient refusé de l'employer à cause de son âge. « La dame a dit: quel âge avez-vous? » Il a répondu qu'il avait 54 ans. « Chez nous, on a une référence entre 30 et 45 ans », qu'elle lui a répliqué. En colère, il est parti, il a été frappé à la porte de Waterville TG qui l'a embauché sur-le-champ. « Il ne nous aide pas ce monde-là », a-t-il conclu dépité. Et s'ajoute à sa frustration le fait que le grand patron de Kruger aurait promis de prendre des hommes. « Ça fait trois mois de ça, sais-tu combien ils en ont pris ? Zéro ! » se soulageant du mépris qu'il a senti de leur part. Malgré ces pénibles péripéties, M. Laflotte était fier des travailleurs avec qui il était. « Ils se sont tenus debout. Pas de bris, pas de rejet de papier... on était des employés presque parfaits.

Au bar où s'est enregistrée une partie des entrevues, l'heure était à profiter du moment pour passer à autre chose, les discussions allaient bon train, on partageait les souvenirs. Il y aura bien d'autres matins pour affronter la réalité.


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